Bayer laisse les victimes du glyphosate sur leur faim
Des calculs cyniques aux dépens de la vie humaine !
Mercredi dernier la firme Bayer a publié l’accord conclu aux USA dans le cadre de la procédure de médiation avec les victimes du glyphosate. Selon les dires de Bayer, les ¾ des 125 000 plaintes déposées par des personnes atteintes de cancer étaient abandonnées en échange d’un versement de 8,8 à 9,6 milliards de dollars US. Bayer provisionne 1,25 milliard de dollars pour d’éventuels accords ultérieurs avec des malades souffrant d’un cancer des ganglions lymphatiques « non-Hodgkin », dû au poison « phytosanitaire » que la firme commercialise essentiellement sous le nom de Roundup
Cette somme – et c’est bien le but recherché par Bayer – semble astronomique à ceux qui reçoivent l’information. Or, les cancéreux ne recevront que de misérables miettes. Selon la journaliste US-américaine Carey Gillam, membre de l’initiative « Right to Know » (le droit de savoir), « Une fois défalqués les frais et honoraires d’avocats, les plaignant.e.s ne recevront que très peu d’argent, si l’on compare aux grosses condamnations infligées dans les trois cas traités jusqu’ici. En outre, Bayer travaille à empêcher les victimes de déposer des plaintes à l’avenir. »
James Hayes, l’un des plaignants aux USA a déclaré à la CBG ; « Il est décevant d’apprendre que les produits de Bayer ne mentionnent aucune mise en garde. Les producteurs de tabac le font depuis des décennies.
De fait, selon une première estimation de la Coordination contre les méfaits de Bayer (CBG), et compte tenu du manque de transparence des chiffres fournis par Bayer, chaque plaignant.e ne recevra que 60 000 à 70 000 dollars. Si l’on considère que les cancers dus au glyphosate, outre leurs lourdes conséquences physiques et psychiques ainsi que les préjudices matériels qu’ils entraînent, raccourcissent de 20 ans la vie des malades, il leur reste à ces derniers juste 300 dollars par mois perdu
Commentaire de Marius Stelzmann, dirigeant de la CBG : « Pour Bayer, la vie humaine ne vaut même pas un salaire minimum. Ces prétendus dommages-intérêts ne sont en aucun cas à la hauteur de la perte de santé et de qualité de vie des victimes, mais de plus ils ne couvrent même pas, loin de là, les frais considérables – médicaux et autres – que la maladie entraîne pour les victimes du glyphosate et leurs familles. Le cynisme de ce calcul témoigne d’un grand mépris. » Par comparaison, lors des premières procédures relatives au glyphosate, le concierge US-américain Dewayne Johnson a obtenu en première instance 39 millions de dollars de dommages et intérêts.
La firme agro-alimentaire et pharmaceutique de Leverkusen vise en réalité à interdire aux victimes potentielles, qui souvent mourront, tout recours ultérieur à la voie juridique. Ce ne sera plus un tribunal indépendant qui gérera les plaintes, mais un « comité scientifique indépendant (class science panel) » piloté par Bayer. Il devra établir si le Roundup peut oui ou non provoquer un lymphome non-Hodgkin, jubile le géant de la chimie. Toutefois ces « tribunaux maison » doivent encore attendre l’agrément de la justice US-américaine.
En dépit de preuves notoires, Bayer s’obstine à nier ses responsabilités. Le géant de la chimie réitère désormais que les accords ne mentionnent aucune faute ou comportement délictueux. Or l’on dispose de preuves évidentes fournies par Monsanto désormais filiale de Bayer. Par exemple, un employé avait informé dès 2008 la toxicologue US-américaine Donna Farmer que des documents internes à la firme faisaient état de recherches sur la corrélation entre le glyphosate et le cancer des ganglions de type « lymphome non-Hodgkin » : Selon ce mail « l’étude de cas-témoins établit le rapport des risques à 2,02 – c’est-à-dire qu’une personne exposée au glyphosate a 2 fois plus de chances de contracter la maladie. » William Heydens, un collègue de Farmer savait même déjà plus exactement en quoi l’herbicide présentait un risque sanitaire accru : celui-ci ne résidait pas dans la seule molécule active glyphosate, mais dans le mélange définitif, enrichi en adjuvants et autres substances : l’actuel Roundup de Monsanto. « Le glyphosate, OK, mais le produit fourni cause des dégâts » disait-il.
Bayer prétend que le paiement de dommages-intérêts met fin à la vague de procès en cours.
Marius Stelzmann, de la CBG, proteste énergiquement : « Rien qu’aux USA, 35 000 procès sont encore en cours. Beaucoup de plaignant.e.s n’ont pas accepté cet accord. En outre, il faut s’attendre à d’autres plaintes, puisque la firme continue à déverser à travers le monde des millions et des millions de litres de ce produit toxique. Y compris en Allemagne et dans le reste de l’UE. Le cours de l’action a perdu plus près 50% en raison des crimes liés au glyphosate et la baisse continue en dépit de l’accord dont se vante Bayer. »
Voici ce qu’Axel Köhler-Schnura, du Secrétariat de Coordination contre les méfaits de Bayer, pense de ce deal :« Le retour à la normale qu’espère Bayer ne peut se produire tant que cet empoisonnement massif ne cesse pas. Les protestations, la résistance et les procès contre Bayer se poursuivront. Pour maximiser ses profits, la firme pollue à tout-va l’environnement naturel et humain sans aucune pitié. Il s’agit d’atteintes à l’intégrité physique, voire de meurtre, et de graves dommages matériels ainsi que d’une destruction irréparable de l’écosystème. La loi doit s’appliquer dans toute sa rigueur aux managers de Bayer qui en sont responsables, et il faut interdire immédiatement la production et la vente du glyphosate et Verser aux victimes de ce produit ainsi qu’à leurs familles et à leurs héritiers un juste dédommagement, y compris dans les pays sous la coup de gouvernants corrompus au service de la firme.
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Marius Stelzmann +49 (0) 211/33 39 11