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La Pilule

16 octobre 2013, France Bleu Gironde

"La pilule est amère" pour la bordelaise Marion Larat

"La pilule est amère", c'est le titre du livre témoignage publié ce mercredi par Marion Larat, victime d'un AVC il y a 7 ans à cause de la pilule contraceptive de 3ème génération. Il y a presque un an, elle a déposé plainte contre le groupe pharmaceutique Bayer et l'Agence Nationale du Médicament.

Le livre s'ouvre sur ce début de soirée de juin 2006 dans la salle de bain familiale de Bordeaux, où Marion Larat, 19 ans, s'effondre, victime d'un AVC (Accident Vasculaire Cérébra), et se referme sur sa rencontre avec la ministre des Droits des Femmes Najat Vallaud Belkacem et son acceptation de son statut d'handicapée. 7 ans ont passé, et entre temps, Marion Larat a subi neuf opérations, des mois de rééducation pour réapprendre à marcher et à parler, et des mois de bataille pour comprendre pourquoi elle avait fait cet AVC. Elle en vient à la conclusion que la pilule contraceptive de 3ème génération est responsable. Et le 14 décembre 2012, elle dépose plainte avec son avocat, le bordelais Jean-Christophe Coubris, contre le groupe pharmaceutique allemand Bayer et l'Agence Nationale de Sécurité du Médicament. 80 autres plaintes suivront. L'enquête préliminaire est toujours en cours.

Marion Larat espère un procès un jour et construit son avenir aussi. Elle a aujourd'hui le projet de créer et commercialiser des bas de contention plus jolis et féminins que ceux habituellement fournis à l'hôpital.

Le récit est paru aux éditions Stock. Il est préfacé par Martin Hirsh le président de l'Agence et de l'Institut du Service Civique, qu'elle a rencontré et qu'elle décrit comme "son pote Martin", et co-écrit avec sa grande soeur Pauline qui raconte comment sa famille a fait bloc, à ses côtés, pour l'aider à surmonter cette épreuve. par Stéphanie Brossard

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INTERVIEW

Dans "La pilule amère", publié mercredi, Marion Larat, première Française à avoir porté plainte contre le laboratoire Bayer et l'Agence du médicament dans l'affaire de la pilule 3e génération, raconte ses séquelles et son combat.

"La pilule est amère", c'est le titre du livre témoignage publié mercredi de Marion Larat. A 19 ans, la jeune femme est victime d'un AVC imputé à la pilule contraceptive de 3e génération. En décembre 2012, c'est la première à porter plainte contre le laboratoire Bayer et l'Agence du médicament. Dans son livre, elle raconte ses séquelles après 9 opérations et des mois de rééducation, mais aussi son combat pour alerter les femmes sur les risques de la pilule.

Question : pourquoi avoir écrit ce livre ?
Marion Larat : Je veux rétablir la vérité sur la dangerosité des pilules, raconter ce qu'il s'est réellement passé, pour que les gens comprennent que les laboratoires et les gynécologues ont menti. Je veux aussi montrer aux autres victimes qu'il ne faut pas rester dans l'ombre, car aujourd'hui elles ne sont plus seules. Je pense que c'était aussi une sorte de thérapie pour moi. J'ai voulu dire qu'après un AVC, heureusement on peut encore vivre un peu.

Question : dans votre livre, vous vous en prenez aux laboratoires ? Ce sont les responsables selon vous ?
M.L. : Oui. Les laboratoires sont des menteurs, et ils le savent. Je prenais une pilule 3e génération. On les appelle des micro-pilules, ce qui laisse entendre qu'elles sont inoffensives. C'est totalement trompeur. En réalité, elles sont potentiellement encore plus dangereuses que les autres pilules. Avant mon AVC, je ne fumais pas et j'étais sportive, mais j'ai ce qu'on appelle un facteur de coagulation, un problème qui touche 10% de la population française. Ce n'est pas une maladie, mais il est interdit de prendre la pilule dans ces cas-là. On ne m'a malheureusement jamais fait faire un test parce qu'en France, il coûte 100 euros et qu'il n'est donc pas effectué automatiquement. Il faut avoir des antécédents. Je milite donc pour que ce test soit prescrit à chaque fois que la pilule doit être donnée.

Question : vous êtes pour une autre forme de contraception que la pilule ?
M.L. : Je ne suis pas du tout anti-pilule, mais je milite pour davantage de prévention. Je dis simplement que c'est un sujet trop important pour que les femmes n'en parlent pas avec leur compagnon et leur médecin. On n'est plus dans les années 1960 où la pilule était vue comme le moyen de contraception le plus inoffensif, car aujourd'hui on sait qu'elle a tué des femmes. Il faut informer sur les autres moyens de ne pas tomber enceinte, comme le stérilet, et dans tous les cas, la contraception hormonale doit rester un choix. Je me demande où sont les féministes dans ce combat et pourquoi est-ce toujours aux femmes d'assumer la contraception ?

Question : vous parlez d'"enfermement chez les valides" après votre AVC ? Que ressentiez-vous ?
M.L. : J'ai eu une hémiplégie totale. C'était horrible car je ne pouvais plus bouger. Mais le plus dur a été l'aphasie, je ne pouvais plus parler. Le mot exact est la frustration, une frustration énorme. Ça a été un handicap social important car je n'ai pas pu retourner en cours après mon AVC.

Question : votre mère vous a demandé de vous conduire en "victime". Qu'est-ce que cela veut dire ?
M.L. : Oui, j'aime dire que je suis forte et montrer que je ne suis pas handicapée. Je n'aime pas pleurer devant les gens et m'apitoyer sur mon sort. Devant les médecins, je disais toujours que tout allait bien. Ma mère m'a fait prendre conscience que ce que j'avais vécu était quelque chose de grave et que derrière mon histoire personnelle, il y avait un véritable enjeu.

Question : qu'est-ce que cela vous fait quand on vous dit que vous êtes la femme par qui le scandale est arrivé ?
M.L. : Que je suis ne pas "Wonder Marion" ! Derrière mon combat, il y a toujours eu ma famille, d'autres victimes et aujourd'hui une association. Je n'aurais jamais pu porter plainte toute seule. On se soutient beaucoup entre victimes, c'est très important et très émouvant.

Question : quels sont vos projets aujourd'hui ?
M.L. : Quand j'étais encore hémiplégique, je portais des bas de contention. Je cherche à monter une entreprise de bas de contention customisés. Mais je n'en dirai pas plus pour l'instant...

Question : vous avez porté plainte en décembre 2012 et une enquête préliminaire est en cours. Vous êtes prête à aller jusqu'au procès ?
M.L. : Oui ! J'irai jusqu'au bout. Les choses se font étape par étape, mais j'ai tout mon temps.