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Maroc

23/7/2007, Destination Santé

Le scandale des médicaments en épicerie à Casablanca

La police marocaine a mis la main sur 50 000 boites d'Aspro (aspirine) et de Claradol effervescent (à base de paracétamol) des laboratoires Bayer. Ces médicaments, entreposés illégalement près de Sidi Moumen à Casablanca, étaient écoulés clandestinement aux commerçants de la capitale. Y compris des épiciers !

Des saisies de produits contrefaits, il y en a tous les jours. Mais la saisie de 50 000 boites de médicaments en une seule fois, voilà qui révèle un trafic à l'échelle industrielle. « Rendez-vous compte qu'il existe à Casablanca un circuit illégal de distribution de médicaments, et que les Laboratoires Bayer – qui en sont les producteurs - connaissaient parfaitement (son existence) » affirme M. Redouane Al Menjra Saady, président du Syndicat des Pharmaciens de Casablanca.

« Les saisies de Claradol effervescent et d'Aspro sont tellement importantes que seuls des salariés ayant accès aux entrepôts du laboratoire pouvaient se permettre un tel trafic. Je vous parle de plusieurs camions remplis de médicaments fabriqués au Maroc, et destinés au marché local. Comment ont-ils atterri dans des épiceries ? C'est extrêmement grave pour la santé du citoyen ».

Rappelons une fois encore, qu'un médicament n'est pas un produit comme un autre. Il doit absolument être acheté en pharmacie et nulle part ailleurs. En aucun cas dans des épiceries. « Il en va de la vie de nos concitoyens ! » tonne Redouane Al Menjra Saady. Un conditionnement de qualité est en effet essentiel pour protéger les médicaments de la chaleur, l'humidité, le soleil... Se soigner avec un produit contrefait, ou dont la qualité est compromise par des conditions de stockage ou de conservation incorrectes, c'est risquer dans le meilleur des cas, un échec thérapeutique. Ou pire, l'apparition d'effets toxiques. Et souvent, c'est la mort qui est au rendez-vous ! Si le commerce illégal de friandises ou de pantalons est perçu comme un délit d'ordre économique, celui des médicaments est lui, à proprement parler criminel.

Face à l'ampleur du phénomène, le Syndicat des Pharmaciens de Casablanca a porté plainte contre les Laboratoires Bayer HealthCare Maroc. Une première. Soutenus par les autorités, les pharmaciens semblent déterminés à démasquer les coupables. Et en la matière, Redouane Al Menjra Saady a déjà son idée. « Tous les éléments de ce dossier tendent vers un même constat : seuls des délégués de Bayer étaient en situation de vendre aux commerçants de Casablanca une telle quantité de produits »… Conséquence, la justice marocaine vient de convoquer le président de Bayer HealthCare Maroc pour qu'il s'explique.

De leur côté, les Laboratoires Bayer en Suisse, sont dans l’expectative. « Une action judiciaire est en cours. Nous attendons la fin de l’instruction avant de nous prononcer » nous a précisé le Dr Daniel Hoch, responsable de la communication au siège social de Bayer Consumer Care à Bâle en Suisse. « En revanche il est clair que nous condamnons toute pratique frauduleuse dans la gestion de nos produits ».

Le Maroc n'est évidemment pas le seul pays concerné par la contrefaçon ou le commerce illégal de médicaments. Un médicament sur dix dans le monde, est vendu illégalement. Et d'après une étude de la Food and Drug Administration américaine, les préparations contrefaites représenteraient plus de 10% du marché mondial. Soit 32 milliards de dollars de bénéfices par an ! Et ce n'est pas près de s'arrêter. Selon la Fédération internationale des Industries du Médicament, ce trafic serait 25 fois plus rentable que le commerce de l'héroïne et 5 fois plus que celui des cigarettes